Pac'omme les autres

 

      Nous sommes en 2010. Dans une petite ville du centre de la France, vit un être particulier, connu sous le nom de Paco.
Paco est atteint d'une amnésie totale. Sa mémoire ne dure que quelques secondes.
Quand il est arrivé dans sa nouvelle habitation, il venait de très loin. Il avait beaucoup voyagé. Il a oublié la plupart des moments de son histoire personnelle.
Paco n'a pas un physique très avenant. Il est de petite taille. Son visage est inexpressif. Il ne sourit jamais et ses gros yeux lui donnent un air malheureux. Son teint de peau est bizarre. Ses gestes ne sont pas démonstratifs. Il dort rarement, il ne fait que se reposer. Il n'aime pas le froid qui l'affaiblit. Il boit beaucoup. Ses repas sont peu variés; il adore les légumes verts mais déteste le fromage et la viande.
Paco ne supporte pas le bruit et apprécie plutôt l'obscurité.
Hormis son amnésie, il est en bonne santé.
Il n'a que peu d'occupations. Il n'est pas très actif et ne tolère que moyennement l'effort. Serait-il paresseux? Il passe ses journées à tourner en rond, à faire et refaire toujours les mêmes choses. Paco est enfermé dans son mutisme.
Quelques fois il regarde dehors sans même savoir ce qui s'y passe. Il a bien remarqué que d'autres vivent non loin de lui. Il trouve même qu'ils lui ressemblent mais, à vrai dire, le monde extérieur l'intéresse très peu. Sa vie est vraiment monotone. Paco est coupé de la réalité.
Parfois des personnes viennent le voir et l'observent. Elles lui parlent mais il ne leur répond pas. Même si ces gens l'interpellent, espérant une réaction de sa part, Paco a plutôt peur et fait comme si de rien n'était.
Quand Paco est né, il était déjà atteint de son amnésie, ce qui peut paraître étrange. Ses parents étaient-ils affectés par la même maladie ?
Les personnes qui s'en occupent lui ont donné son nom. Elles le nourrissent et se chargent du ménage.
On ne connait que peu de choses des origines de Paco. On ne sait pas s'il se souvient de son nom ou de son âge, il ne parle pas. On ne sait pas le nom de ses parents et s' il a des frères et sœurs.
Il vit dans un endroit étrange. C'est un lieu étroit et très humide. Il est vide et pour toute décoration, trône seulement une grande plante verte. C'est plutôt sinistre, mais cela ne le dérange pas ; heureusement, il ne s'en rend pas compte.
Paco n'a pas la vie facile. Il vit seul. Il arrive que les personnes qui l'ont en charge oublient de lui amener de la nourriture ou encore de nettoyer son logement. Quelques fois Paco mange seulement tous les deux ou trois jours, quand on pense à lui.
Paco a déjà eu des compagnons mais ils ne sont jamais restés longtemps. Ils étaient comme lui, ils avaient la même maladie. Il en a vu partir des amis depuis le temps qu'il est là ! Il ne se rappelle plus vraiment d'eux. D'autres sont venus les remplacer mais il n'a jamais eu le temps de se lier d'amitié. Le pourrait-il ? Son caractère anxieux semble l'éloigner des autres. Mais cette solitude ne lui pèse pas vraiment. Il n'a pas l'impression d'être abandonné. Paco a toujours été seul.
Il est enfermé à longueur de journée. Il ne peut et ne doit surtout pas sortir. Cela représente un trop grand danger pour lui. Il a pourtant essayé un jour. Il a cru mourir ; il ne pouvait plus respirer, il se sentait oppressé. Ses " geôliers " l'ont rapidement fait rentrer et il s'est tout de suite senti mieux. Le monde extérieur n'est, décidément, vraiment pas fait pour lui.
Quand il a un moment de lucidité, Paco se demande pour quelle raison il se retrouve dans cet endroit clos où pratiquement personne ne peut accéder. Pourquoi est-il enfermé là ? Il n'a jamais fait de mal à personne, ce n'est pas un criminel.
Il ne supporte plus cette vie morne. Serait-il dépressif ?
Pourtant, personne ne semble s'en apercevoir ou s'en soucier. Paco se sent mal-aimé. Il est vrai qu'il n'est pas très démonstratif. Il n'a pas l'habitude d'exprimer ses sentiments.
Il se méfie aussi beaucoup de ceux qui l'entourent. En effet, certains prennent un malin plaisir à venir l'effrayer, l'embêter. C'est un incessant défilé qu'il ne peut plus supporter. Paco est stressé.
Que dire quand on se moque de lui, de son physique ? On pourrait penser qu'il est d'une susceptibilité démesurée et pourtant, c'est bien ce qu'il ressent.
Que va-t-il devenir ? C'est la question qui revient sans cesse à son esprit. Va-t-il rester enfermé ainsi toute sa vie ? Il n'y aura donc jamais personne pour l'aimer, lui, tel qu'il est ?
Il n'est pourtant pas méchant et serait incapable de faire du mal.
Cependant, il arrive que certains le regardent avec attention, avec tendresse, comme le petit Matthieu qui montre Paco à sa mère en disant : " C'est ce poisson que je veux ! "

 

Oriane CHAMOREAU